lundi 4 février 2013

Le jour où je n'étais pas là - Hélène CIXOUS




CIXOUS…c’était d’abord pour moi, les soirs de théâtre, un nom imprimé sur le bitume à Reims.


Puis c’est devenu Hélène CIXOUS, l’auteur de Le jour où je n’étais pas làC’est avec plaisir que j’ouvre ce blog consacré à la littérature et au handicap (mais aussi travail, emploi et social…) en vous présentant ce livre incontournable. Parce que l’écriture est belle, j’ai pris le parti d’intégrer de grandes citations pour vous faire découvrir ce rythme atypique.

Ce livre raconte l’oubli d’un enfant « différent », les souvenirs qui reviennent, Alger en arrière-plan et la quête auprès de la famille des circonstances de sa mort.




Un 1er mai, un livret de famille, un chien à trois pattes exhument le souvenir de l’enfant niais :
"Durant toute cette journée je descendis souvent de sous la  terre, je marchai sur la terre, je traversai des ponts des heures entières, je longeai des chemins sans nom c’était le printemps je vis un coquelicot tout seul allumé tout en haut de sa hampe je descendis plusieurs fois sous la terre, j’y fus surprise par mes morts, surtout l’un, un de mes fils, auquel je ne pensais plus jamais, et qui me revint de a à z ce jour-là, j’ai pleuré […]"

Elle écrit alors 
« un livre que je ne voulais surtout pas écrire ».

Elle revient sur sa naissance. Déjà, un malaise 
« Je n’arrivais pas à voir l’expression du visage de la lune »
[Me fait penser au court métrage Mon petit frère de la lune ]

Un flottement :
« Elle n’en revient pas. Elle s’attarde dans une heure bizarre, flottante, entre deux heures. Elle vient d’accoucher d’une part. D’autre part ce qui vient d’arriver c’est que celui qui vient de naître, il n’est pas encore tout à fait arrivé quelque part, il n’est pas à sa place, il remue encore faiblement à l’entrée de la scène, à l’extérieur comme retenu par une grande incertitude, comme timide. […] elle sent pourtant passer une forme manquant de force ou au contraire une forme d’une force monstrueuse de faiblesse. L’enfant flou. »

Plus tard, reste la question de la place de cet enfant dans sa vie de mère :
« Comment répondre à la question : combien avez-vous eu d’enfants, sans lente et longue réflexion […] Vous avez eu des enfants ? oui oui oui, combien ? ah, ça ! cela dépend. Depuis l’apparition de mon fils l’agneau aux mains palmées, il ya Impossibilité, depuis l’arrivée de mon fils imprévue de mon fils l’Impossible, je ne puis dire combien sans que le mot combien se fende, l’enfant aussi, fendu, tout fendu et défendu et dé-fendu par le dedans , combien d’enfants ? »

A sa naissance, elle témoigne du changement brutal de destinée, de chemin 
«  J’écris dans la maison que j’ai fait construire à cause de toi, en hâte pour toi et contre toi tandis qu’Eve notre mère te gardait, je construisais je n’écrivais plus, au lieu de poèmes, je bâtissais je répondais en pierre à ton arrivée pour les temps des temps […] je faisais la maison où tu n’es jamais venu. »

Vient le jour fatal 
« Un an je ne sors pas. Un jour, je sors. Et il s’en va. Sans moi. Le jour où je ne suis pas là. »

C’est un livre fort en émotion, mais pas seulement, c’est aussi une formidable écriture au fil de la pensée où s’entrechoquent le passé / le présent, les faits / les suppositions, la douceur / les sentiments crus.

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